La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat : que retenir ?

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La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat : que retenir ?

défiscaliserLa prime exceptionnelle de pouvoir d’achat dite « prime exceptionnelle Macron » ou encore « Prime gilets jaunes » a été annoncée par le Président, Emmanuel Macron le 10 décembre 2018 suite à la mobilisation des « Gilets Jaunes » dans le but de soutenir le pouvoir d’achat des ménages.

Très vite, cette prime défiscalisée et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite de 1000 euros, a été inscrite dans la loi n°2018-1213 dès le 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

Attractive de prime abord, l’exonération est néanmoins soumise au respect d’une série de conditions dont la complexité n’a probablement pas été appréhendée par les TPE ou PME (ne disposant pas de ressources juridiques internes ou externes), dans leur précipitation d’octroyer un cadeau de fin d’année.

En revanche, de son côté l’URSSAF et l’administration fiscale ne manqueront pas de se pencher sur le sujet et de procéder à des contrôles, dans l’objectif de vérifier que la totalité des spécificités de cette prime aient bien été respectées par les entreprises. Le but étant également de détecter des versements d’opportunité effectués par les sociétés c’est-à-dire des versements effectués au titre de la Prime Exceptionnelle de Pouvoir d’Achat (PEPA) afin d’obtenir l’exonération alors qu’ils auraient dû être soumis à cotisation.

Les contributions d’attribution et d’exonération

Deux instructions interministérielles du 4 janvier et 6 février 2019 ont rappelé les conditions principales de la prime.

La prime est facultative et son montant est libre. Elle peut être versée par tout employeur soumis au régime UNEDIC d’assurance chômage.

élément rémunérationToutefois, les exonérations fiscales et sociales ne sont attribuées que si la prime n’excède pas 1000€. La partie qui excède cette limite est réintégrée dans l’assiette de l’ensemble des cotisations, contributions, impôts et taxes.

Elles ne s’appliquent qu’aux primes versées aux salariés dont la rémunération perçue en 2018 est inférieure à 3 fois la valeur du SMIC calculée sur un an sur la base de la durée légale de travail soit 53 944,80€ (3X1820hX9,88€).

Les salariés éligibles sont ceux liés par un contrat de travail au 31 décembre 2018. Si la prime est versée avant cette date, les salariés éligibles sont ceux qui sont titulaires d’un contrat de travail à la date du versement.

Pour être exonérée, la prime doit avoir été versée entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019. Aucun versement de la prime éligible à exonération ne peut être effectué au-delà du 31 mars 2019.

Elle doit figurer sur le bulletin de paie mais doit être déclarée comme un élément de rémunération non soumis à cotisations et contributions. Cette déclaration est réalisée selon les modalités de droit commun dans le cadre de la déclaration sociale nominative (DSN).

Elle ne doit pas être soumise au prélèvement à la source.

Enfin la prime ne peut en aucun cas se substituer à des augmentations de salaire, ni à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans l’entreprise.

Mise en place de la prime de la prime Macron au sein de l’entreprise

L’instauration et les modalités de la prime sont fixées au choix de l’employeur :

contrôle URSSAFSoit avant le 31 janvier 2019 par voie de décision unilatérale et auquel cas, le Comité Social et Économique (CSE) devait être informé de cette décision au plus tard le 31 mars 2019 ou par accord d’entreprise.

Soit après le 31 janvier 2019, nécessairement par accord d’entreprise conclu

  • Dans le cadre d’un accord collectif de droit commun (avec un ou plusieurs délégués syndicaux) ;
  • Entre le chef d’entreprise et les représentants des syndicats représentatifs dans l’entreprise (avec un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative dans l’entreprise) ;
  • Au sein du CSE par un vote positif sur le projet de l’employeur à la majorité des membres présents lors de la réunion du comité ;
  • Par ratification par le personnel d’un projet d’accord proposé par le chef d’entreprise à la majorité des 2/3 appréciée par rapport à l’effectif de l’entreprise.

Risques de redressement URSSAF et réintégration fiscale

Les conditions énumérées ci-dessus sont cumulatives et doivent être strictement respectées par les entreprises. Leur inobservation pourrait conduire à la remise en cause intégrale et complète des exonérations appliquées et à la totalité des sommes distribuées.

PEPAAinsi, la simple substitution partielle (remplacement d’un élément de salaire) suffit à faire perdre l’ensemble des avantages sociaux et fiscaux et pour la totalité des sommes versées.

De même, un manquement à l’un des principes d’organisation et de conduite de la négociation collective peut entrainer la remise en cause des exonérations appliquées.

La prudence aurait donc dû être de mise pour les entreprises car les conséquences financières pour celles ayant décidé de payer cette prime, qui faut-il le rappeler est facultative, pourraient être désastreuses.

Certes, cette prime a séduit. 2,2 milliards d’euros de primes ont été versés par les entreprises entre le 10 décembre et le 31 mars 2019.  Mais, gardons à l’esprit ses effets pervers. Outre le fait que l’URSSAF et l’administration fiscale ne se priveront pas de contrôles qui pourraient s’avérer être une manne, cette mesure phare du Président Macron pourrait conduire à faire stagner les salaires.

Reconduction de la prime en 2020

Le Président Emmanuel Macron a annoncé le 25 avril 2019, suite au Grand Débat National et à la crise des « Gilets Jaunes« , la reconduction de cette prime défiscalisée.

Gillets jaunes macronIl a déclaré lors d’une conférence de presse « Nous avons fait beaucoup » pour cela, mais « il nous faut aller plus loin », notamment avec « la répétition cette année de la prime exceptionnelle sans charges ni impôts décidée l’année dernière dans le cadre de l’intéressement des entreprises si elles décident d’apporter 1.000 euros de plus ».

Ainsi, semble-t-il que cette reconduction ne serait possible que pour les entreprises ayant un accord d’intéressement.

Affaire à suivre…

Jessica IP TING WAH
Avocat Associé
In Extenso Avocats
Hauts de France
jessica.ip-ting-wah@inextenso-avocats.fr