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Les réseaux sociaux : espace privé ou public ?
Les réseaux sociaux : un nouveau moyen de communication pour les salariés
De nouvelles problématiques sont apparues ces dernières années au sein des entreprises face à l’évolution des réseaux sociaux. De nombreux moyens de communication sont désormais à disposition des internautes, et les salariés n’hésitent parfois pas à communiquer via les réseaux sociaux sur leurs conditions de travail, leurs relations professionnelles, ou encore le fonctionnement et l’organisation de leur entreprise.
Ce phénomène engendre un conflit entre plusieurs libertés. En effet, chaque salarié dispose d’une liberté d’expression et d’un droit au respect de sa vie privée, toutefois ces droits fondamentaux ne sont pas sans limite. Effectivement, le salarié ne doit pas tenir de propos injurieux ou diffamatoires concernant son employeur. Il est également tenu de respecter une obligation de discrétion et de loyauté vis-à-vis de son employeur. Un équilibre doit donc être opéré entre l’intérêt de l’entreprise et la vie personnelle du salarié.
Suite à l’essor des réseaux sociaux, la problématique des propos tenus par les salariés concernant leur employeur ou plus généralement leur entreprise sur ces supports s’est rapidement dessinée, et elle est parvenue devant les juridictions. Le contentieux concerne majoritairement le réseau Facebook.
Propos tenus sur un groupe fermé Facebook
La Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt récent dans cette matière le 12 septembre 2018, ayant apporté des précisions concernant l’étendue du pouvoir disciplinaire de l’employeur.
Dans cette affaire, une salariée membre d’un groupe Facebook, intitulé « Extermination des directrices chieuses », avait tenu des propos injurieux et offensants à l’égard de son employeur. Ce dernier avait décidé de licencier sa salariée pour faute grave, cette dernière a alors contesté le caractère réel et sérieux du licenciement. Or la Cour de cassation a jugé que les propos diffusés sur le compte ouvert par la salariée n’étaient accessibles qu’à des personnes agrées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir une groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée. La Chambre sociale écarte donc la qualification de faute grave. (Cass. soc. 12 septembre 2018, n° 16-11690 FSPB).
Ainsi, la Cour de cassation se fonde sur deux éléments pour apprécier le caractère privé des propos. D’une part, elle s’attache au nombre de personnes ayant pris connaissance des propos, et regarde si ce nombre est limité. Cependant, aucune précision supplémentaire n’est apportée concernant le nombre de membres à partir duquel une conversation perd son caractère privé. D’autre part, les juges sont attentifs au paramétrage du compte Facebook, c’est-à-dire si le groupe est accessible librement ou, au contraire, s’il est fermé.
Le salarié n’est donc pas sanctionné automatiquement par l’employeur pour avoir tenu des propos injurieux à son égard sur un réseau social. Avant d’engager une procédure disciplinaire, l’employeur doit être attentif aux conditions dans lesquelles l’information a été diffusée, et à l’étendue du public visé.
Modes de preuve pour l’employeur
L’employeur peut essentiellement sanctionner le salarié dans l’hypothèse où les propos tenus sur un réseau social ont un caractère public. Dans le cas contraire, les propos ne constitueront pas un motif de licenciement. C’est donc à l’employeur de rapporter la preuve du caractère public des propos.
Or l’employeur ne peut pas utiliser, en tant que mode de preuve licite, les informations recueillies sur la page Facebook d’un salarié au moyen d’un portable professionnel d’un autre salarié, alors que ces informations étaient réservées aux personnes autorisées par l’intéressée. Les publications du salarié ne peuvent être utilisées que si le profil de ce dernier est public (cass. soc. 20 décembre 2017, n° 16-19609 D).
Nécessité d’une utilisation prudente des réseaux sociaux
En dehors de toute sanction disciplinaire propre à la relation de travail, le salarié peut également être condamné pour infraction pénale, par exemple pour injures publiques.
Ainsi, il est conseillé aux salariés de rester prudents quant à l’utilisation des réseaux sociaux en tant que moyen de communication, concernant des informations en lien avec leur vie professionnelle.
A ce sujet, la CNIL avait publié une fiche pratique en 2011, nommée « Maitriser les informations publiées sur les réseaux sociaux » afin de sensibiliser les utilisateurs et les inciter à faire preuve de vigilance, notamment en adaptant le paramétrage de leur compte.
Mathilde LACOINTE
In Extenso Social